Installée confortablement dans mon bureau,
Bureau aux murs bien propres, bien clairs,
Vue imprenable sur un grand parc.
Ce parc si vivant en été ensoleillé
Et si morne l’automne naissant.
Je regarde amusée, les gens qui courent
Après je ne sais trop pourquoi, pour qui.
Installée confortablement dans mon bureau,
Bureau bien chauffé le froid venant.
Vue imprenable sur les devantures de magasins,
Devantures si gaies l’été ensoleillé
Et si grises le mauvais temps naissant.
Je regarde tristement les sans abris,
Qui ont trouvé refuge calés contre ses devantures.
Le froid de la nuit leur fait déjà si mal.
Installée confortablement dans mon bureau,
Bureau si accueillant dès le matin,
Une tasse de café chaud entre les mains,
Mains refroidie par le petit trajet du matin,
Mes collègues face à moi parlent de leur famille,
Et je me plains et je ne vois pas la souffrance
Qui se joue sur la rue, dans le parc si froid.
Moi, moi, il n’y a que moi qui compte.
Installée confortablement dans mon bureau,
Bureau où mon âme est désolation
Je n’écoute pas ma collègue dire
Qu’elle a rendez-vous chez le médecin.
Non, il n’y a que moi, moi qui compte.
Et pourtant la vie se joue devant ma personne.
Cette nuit, l’ange de la mort est passé
Emportant sous ses ailes une amie,
Mon amie de chaque matin,
Mon amie sans abris, morte de froid.
Installée confortablement dans mon bureau,
Ce matin seulement, je m’inquiète
De la santé de ma collègue bien malade,
Mauvaise nouvelle, la vie lui joue un sale tour.
Aujourd’hui, oui, aujourd’hui seulement,
Je prends conscience qu’il n’y a pas que moi, moi.
Aujourd’hui, je crie mes désarrois au monde.
Je lève la tête et crie vers les cieux,
Maman tu avais encore tant à m’apprendre,
Pourquoi le Seigneur permet-il tout cela ?